samedi 24 mai 2014

Requiem


A écouter le requiem de Brahms en boucle depuis trois jours, il vous vient de drôles d'idées et d'insaisissables nostalgies. D'où, un samedi matin, l'envie de revenir sur... quoi ? Six ans de blog, déjà ? C'est à peine croyable. Six ans largement discontinus d'ailleurs, parsemés de longs silences difficiles, car souvent lorsqu'on se tait, c'est moins parce qu'on n'a rien à dire que parce qu'on ne sait plus dire. Étrange de relire ces morceaux de textes, ces portes ouvertes sur des univers entraperçus, des personnages tirés du néant par une vision d'un soir, et ensuite laissés là, sur une page virtuelle, en attente. Figés. J'ai le sentiment d'avoir autrefois bien plus aimé les mots qu'aujourd'hui - ou plutôt, de leur avoir fait davantage confiance. Ces derniers temps, il faut bien que je leur cède, que je les laisse s'écouler à travers moi, parce que c'est ma seule porte de sortie et que j'en ai besoin. Mais tout finit toujours par tourner autour de rêveries pseudo-autofictionnelles à tendance fortement dépressive ou, tout au moins, désabusées. Je connais mon mal, j'en suis consciente !
Je me dis que c'est en attendant autre chose. 
Et que les mots, quels qu'ils soient, quand ils semblent justes et qu'ils portent, quand ils sonnent justes, sont déjà justifiés.
A relire ces anciens posts, je me rends compte, avec un réel amusement, de tout le temps passé ; je me plonge dans ces textes comme dans ceux d'un autre, je redécouvre quelqu'un, derrière les phrases, qui n'est autre que moi, mais qui n'est plus moi. C'est replonger dans les années de prépa et leurs exubérantes rêveries, leurs perspectives d'avenir ouvertes, trop ouvertes. 
J'y lis bien plus d'humour qu'aujourd'hui, j'y trouve plus de légèreté, de l'insouciance doublée pourtant de certaines certitudes - de convictions, plutôt. D'un sentiment de liberté, également. Toujours oser. 
C'est revenir aussi sur ces années desséchantes, où je n'écrivais plus. Depuis quelques mois, quelque chose s'est débloqué ; j'ai accepté de chavirer et l'instabilité, la fébrilité, l'hypersensibilité, la tristesse sont parfois le lot de ce tangage dont je ne voudrais pourtant pas me défaire. Ça fout pas mal de choses en l'air, ça me troue le ventre d'angoisses, ça fout le bordel mais c'est vivant. 
Incapable, je suis incapable d'écrire dans la sérénité. Le calme, le bonheur, l'euphorie satisfaite, les rails déroulés tout droit jusqu'à l'horizon, l'équilibre des jours, la coïncidence intime, tout ça me plaque au sol. C'est parfois agréable, parce que je m'oublie moi-même et je peux refuser de penser à ce qui importe le plus, à ce que je sais être le plus important : écrire.
Parce que je me décharge sur la routine du risque (et du plaisir) des mots.

Alors ces derniers temps, ça se bouscule, les larmes coulent un peu plus souvent, les enguelades reviennent, les doutes et l'angoisse me foutent pas mal la gerbe, le boulot avance mal, les éclats de rire succèdent aux pensées noires en un rien de temps.

Mais au moins j'écris.

jeudi 22 mai 2014

Il avait du travail. Les rayonnages de livres le regardaient d'un air soupçonneux, les tables jonchées de feuilles et d'ouvrages ouverts lui reprochaient silencieusement sa rêverie solitaire, si douce dans le début d'après-midi pluvieux qui versait sur la ville une chaude indifférence de printemps. Le temps n'importait plus vraiment, toutes choses étaient égales par ailleurs et il pouvait sans trop de culpabilité abandonner la liste de tâches du jour pour un morceau de musique, une envolée de mots lâchée sur l'écran, des pensées errantes incitées à l'errance.
Il avait la sensation que peu de choses importaient vraiment d'ailleurs, hors de cette intimité nourrie de lui-même, hors de l'espace fécond de son imagination enfin radoucie, enfin tendre et même encore un peu fébrile après ces quelques semaines de navigation en eaux troubles. C'était difficile de lutter contre cette délicieuse dérive qui paraissait si juste, si légitime et dont il goûtait la vérité bien plus que pour tout ce qu'il aurait pu (dû !) faire d'autre ce jour-là.
Car aujourd'hui, un certain discernement, comme une sensibilité particulière, le cernait, l'habitait et le définissait. Le spectacle des gens dans la rue, dans le métro, prenait un relief singulier, et il voyait les accrocs du quotidien par où les fils se cassaient, se mêlaient et s'accidentaient. Il savait que ces éclats imprévisibles et cette sorte de transparence du monde étaient plus importants que tout, et qu'ils valaient bien qu'on délaisse quelque temps ce dont la raison, le devoir et toute l'urgence du monde exigeait qu'on s'occupe. 
D'où le vague sourire aux lèvres et une bienheureuse sensation de lucidité.
D'où le manque de concentration et l'horreur de l'horloge avançant, imperturbablement et imperceptiblement.
(Amen !)

mercredi 21 mai 2014

La maison

J'étais devenue une pièce ouverte aux quatre vents, un lieu ballant, brinquebalant, aux portes et fenêtres claquantes, aux rideaux envolés, traversée par les autres, et ne sachant plus qui habiter. Certains passaient au loin et détournaient à peine le regard de ma terrasse mangée de mousse, faisaient le tour par le sentier grimpant dans le jardin, et je ne les revoyais pas, ils marchaient le long de la plage en contrebas. D'autres jetaient un oeil curieux et venaient près, plus près, regarder à l'intérieur, jeter une poignée de sable sur le carrelage mat, écouter crisser sur la surface nue les grains translucides, déjà mouillés d'embruns, puis repartaient, quelquefois avec d'imperceptibles regrets. Mais nombreux étaient ceux qui s'aventuraient dans mon antre, qui franchissaient les seuils multiples dont j'étais bordée et frôlaient les meubles, contournaient les chaises éparses, étreignaient qui un fauteuil, qui un coussin abandonné, et prenaient leurs aises dans la pièce, s'y sentaient bien. Du moins, je crois. 
Je me nourrissais de ce fourmillement d'âmes connues et inconnues. Je sentais ce lent balancement des vies, accrochées les unes aux autres, et qui réclamaient de l'attention, une caresse, un baiser, de l'amour. J'accueillais des naufragés par centaines, qui se retrouvaient là, dans la pièce unique, dans la pièce immense ouverte aux quatre vents.
Ouverte à eux.
C'était ma jouissance intime, mon plaisir inquiétant, que d'être ainsi peuplée des autres, de me laisser ainsi envahir des joies, des craintes, des désirs des autres. La foule obscure tapissait mon intérieur, devenait elle aussi mobilier pour accueillir de nouvelles errances venues à leur terme. C'était quelque chose d'une commune nécessité qui nous rassemblait là, qui les rassemblait en moi et leur donnait prise, leur offrait de s'arrêter un moment.
Je sentais avec force combien je leur étais nécessaire, combien mon nid de bord de mer leur était un refuge obligatoire dont ils ne parviendraient pas à s'arracher. Je jouissais de cet emprisonnement volontaire où ils se jetaient, car j'en avais besoin, je devais nourrir ma solitude et m'emplir de présences. Il me fallait à tout prix oublier la vieille maison désertée, l'intolérable sentiment de moi-même et de mon abandon. Me jeter dans l'ailleurs, dans l'altérité merveilleuse du monde et noyer à coups de transgressions, en offrant mes frontières, en permettant qu'elles soient inlassablement violées, la conscience opaque que je portais douloureusement.

Quand tous furent arrivés, je laissai la mer se porter jusqu'à mes murs de pierre, et tous entendirent la nuit qui se resserrait et nous étreignait tous ensemble, en ce lieu magiquement présent, étrangement hanté, où les échos des êtres se rencontraient sans cesse et s'invitaient à céder mutuellement à l'oubli de soi-même.

Et je sentis mon corps, mon esprit, ma vieille carcasse désuète, se disloquer sous les assauts des autres ; je sentis que je m'effritais dans les mots et les douleurs des autres, et qu'on ne m'épargnerait pas. Et que je ne voulais pas être épargnée.
Je voulais disparaître dans cette trouble multiplicité, me fondre dans le nombre.

Mourir sous le nombre.
Vivre dans le nombre.

samedi 17 mai 2014

Nothing else matters

Rongée, fatiguée, épuisée. Vacarme intérieur, bordel immédiat. Instables incertitudes, vastes bourbiers épuisants, sentiments à la dérive, malmenés, détournés, reprisés, abandonnés. Îlots pour souffler, juste un temps, apnée à nouveau et malaise, et mal-être, et peur enfin, qui plane au fond sous les remous.
Devise, accordes-y de l'attention. Réfléchis. Arrête. Laisser faire, prendre prise. 
Rechercher une ligne droite ou presque.
Échouer.
S'échouer. Trouver une rive. Un bord. S'agripper. 

jeudi 15 mai 2014

Au loin, derrière les cheminées d'usines, rougeoyaient les braises du couchant dont le tapis pourpre écrasait la ville. Je tirai sur ma cigarette avec avidité, me brûlant les yeux à ces lueurs d'enfer. La poix noire s'échappant des toits m'oppressait et jetait sur mes pensées sombres quelque amertume supplémentaire et une pointe d'angoisse.
J'attendais Nell devant l'épicerie du coin et je remuais en moi de vieilles tristesses rebelles et périmées. Des fragments d'histoires ébauchées bien des années auparavant me revenaient comme des fantômes étrangers, j'essayais de retenir un moment le souvenir de ces nuits passées, à la lueur d'une mauvaise lampe, sur la table tâchée d'encre, la plume à la main, l'épuisement dans l'âme, à écrire pour rattraper le fil déchiré d'une vie.
Pour garder Nell auprès de moi.
Nell était partie.
Nell arrivait au croisement et me rejoignis devant l'épicerie. Elle m'embrassa l'air soucieux. Je regardai ses boucles brunes et argentées, sa peau trop claire, ses lèvres trop fines et ses oreilles minuscules, nichées dans la belle chevelure. Le front plissé, elle semblait torturée par une inquiétude muette, sans chercher à dissimuler son doute. Son regard interrogateur se posa sur moi et me transperça, froid, trop froid, pour que je puisse oublier que Nell était vraiment partie.
Bonjour, ça va ?
Un furtif baiser déposé sur sa joue, elle détourne la tête. Quelque chose la préoccupe, j'essaie d'accrocher un sourire sur ce visage aimé. Je n'arrive plus à lire en elle.
Je prends sa main et la mène le long de la rue principale vers le parc derrière l'école primaire, là où des buissons rachitiques et une herbe grise font office d'espace vert pour les habitants du bourg. Tout est noyé de la poussière brune que jettent en permanence les grandes cheminées sales s'abreuvant au ciel comme les gueules ouvertes, monstrueuses, d'un monstre mythologique. La ville étouffe progressivement sous cet insensible ensevelissement. Je sens en moi, depuis des mois, que mes réflexions s'engluent, que mes sentiments s'embourbent dans une mélancolie crasseuse, les jours s'enfoncent doucement dans cette vase impalpable, mélange de routine quotidienne, d'immuabilité des choses et de pollution noire.
Nell serre ma main d'un coup, enfonçant ses ongles dans ma paume. Je ne sursaute pas, je la regarde simplement retenir une larme qui brille au coin de l'oeil gauche. Encore ces angoisses qui reviennent, qui peuplent toujours davantage son esprit. Je laisse un doux baiser contre sa tempe, pour calmer sa frayeur. 
Je me demande ce dont elle se souvient des méandres brumeux de l'agonie, des déchirements de la maladie, des épreuves de la folie. Garde-t-elle quelque chose de ces semaines de tourment, de mes invocations, de mes imprécations, de mes feuilles noircies et renoircies, vendues au plus offrant, pour acheter les remèdes, pour payer les médecins... reste-t-il en elle ces échos de nuits sans fin, à souffrir pour elle, à mourir avec elle, veillant son corps décharné, son visage troué par la douleur, ses mains tremblantes agrippant les montants du lit ? Aujourd'hui impassible, elle est comme un miroir trop lisse, trompeur, derrière la surface duquel tant de choses passées exigent de renaître avec violence. 

Nous prenons place sur l'unique banc du parc dont la peinture écaillée se mêle au bois pourri. J'enlace sa taille et pose ma tête sur son épaule.

Et les vers me reviennent.
Impossible d'y échapper.
Mes mots fous remontent de la tombe, mes propres images m'obsèdent, et je cherche à comprendre encore, dans ces rythmes, dans ces phrases, dans ces déchirements poétiques, ce qui a pu changer la donne. Par quelle offrande ai-je bien pu inverser le cours des choses, devenir nécromancien, faire renaître les morts ?
Quelle est l'alchimie du verbe, miraculeuse, infernale, qui a rallumé l'étincelle de vie, qui a ramené mon amour ? 

Qu'ont fait mes mots pour accomplir ce monstrueux blasphème ?

Ni elle ni moi n'en savons rien. Nous nous agrippons l'un à l'autre, comme deux êtres naufragés, incapables de se porter seuls et supportant à peine d'exister à deux. Je me sens si faible dans cette ville mouroir, sur cette terre de cendres où s'enlacent les vies en fin de course.
Je résiste malgré moi à la valse lente des morts promises, des morts souhaitées, je désire un repos que j'ai refusé, que j'ai écarté et qui m'est désormais interdit. 
Condamné à vivre avec elle, pour elle, à lire en elle ce que nous étions et ne serons plus, je me demande combien de temps il me faudra durer.

Le ciel s'éteint d'un coup, le rouge meurt dans le noir nocturne.
C'est l'heure de rentrer.


mercredi 7 mai 2014

Born survivor

Journée de gris sale barbouillée d'états d'âmes en vrac, qui s'échappent par tous les bouts. Jour d'humeur indécidable, va-et-vient fébrile entre revendications hystériques, rages mal digérées et rêveries fumeuses. Casque sur les oreilles, métro, gens, regards, à travers les couloirs d'une vie toute d'incertitudes, stations délabrées, stations douloureusement habitées, stations entrevues jamais atteintes, quelques coins d'escaliers où l'on se rend stone ; et l'envie de défendre contre tous ce labyrinthe à moi.
Ciel d'orage, mouvant, profond, qui s'écharpe, qui crève sur la BNF, répand ses longues entrailles grises et blanches sur nos têtes inconscientes - sur leurs têtes aveugles, moi je lève les yeux. Sentiment d'absorber le monde, d'avoir le monde tout en moi et de digérer dans un méli-mélo d'émotions contraires une sorte de vérité impalpable, fantasme du poète inspiré qui se shoote à coups de révélations incommunicables. On retape sa tour d'ivoire, on rafistole les trous de la charpente pour se cramponner à son logis intérieur avec un reste de savoir-vire.
Se couler dans le flot fusant des images possibles, gambader à l'aise entre les mondes, j'ai comme une fatigue hallucinée qui me colle à la peau qui aplatit tout, me jette à terre, là où les vieux démons guettent. Alors : des mots échangés, des drames personnels qui circulent en flux continu et imprègnent le tissu fragile du réel, qui le rendent innombrable.
Comme une fissure qu'on pressent, qu'on recherche, qu'on aggrave, qu'on travaille au corps à corps pour lui faire rendre toute son âcre tristesse. Jeu de forces, faut savoir parier pour perdre, jouer à qui morflera le mieux, à qui jouira en premier du désespoir à deux balles qu'on aime tant, qui ne nous lâche plus et qui bâtit en nous des citadelles d'outre-monde, architectures torturées de désirs et d'effrois désirables. 
Se mettre en jeu prendre le risque du malheur vouloir sentir à en crever
perdre sa carapace d'ennui
craquer l'allumette et foutre le feu

mardi 6 mai 2014

Tides of time

Trois gouttes d'encre sur la page, trois larmes tombées dans la nuit à travers le filet lâche de mes pensées. 
Trois fois le tour de ton corps, trois fois la lame aiguisée des souvenirs qui vient fouiller le coeur, remuer l'intérieur.
Trois lignes en fragments qui pointillent sur la page, destins à peine tracés, non fléchés. Trois flashs de musique qui viennent cramer la tête, assourdir la conscience, tromper l'attente. Accrocher le regard et griller les rétines dans un dur abandon des sens.
Encore une fois, encore une, à ressasser tout ça - à oublier tout ça en dansant, en jetant des morceaux de moi là, au milieu des gens, pour tout habiter, pour dévorer les autres, me rassasier enfin - jamais ? de mon besoin des autres.
Trois sourires échangés dans un clair obscur de stroboscopes, et le rail tortueux de mes désirs qui se courbe, qui s'hérisse et poursuit tout délirant sa course aux dérives profondes.
Trois notes, trois mots, des mots encore par centaines - qui effacera le plus vite ton visage qui saura tant triturer ton souvenir que tu disparaîtras dans le noir des rythmes, dans le souffle humide de la foule et son agitation glaçante.

Désarticule à travers l'orage grondant des sons, ploie l'échine sous la caresse brutale des notes. Trois fois remets en jeu tes certitudes et brille dans le noir, brillons du noir si dur si froid si beau, je veux brûler tes étincelles. 

Danse la courbe du réel qui se cambre, qui vrille et craque.
Attrape-moi.

jeudi 1 mai 2014

Aperçus

Des scènes de beuverie lasse dans une auberge mal famée, ou une séance de cinéma entre deux amants tranquilles et tristes, qui ne se parlent plus. Un coin de tapisserie racontant les exploits perdus d'un sombre chevalier errant. Une atmosphère lourde, étouffante, où pèse une musique violente et où s'acharnent les corps à se rencontrer encore - peut-être un souterrain où on s'éclate dans les rave parties du futur. Une scène de soleil levant sur un lac endormi, qu'observe un seul témoin perdu dans ses rêveries, avec aussi sans doute, quelque plume à la maison, où le coeur à l'orage. Ou bien plus vaste, plus grand, plus ambitieux : une histoire de lecture effrénée, dans une bibliothèque où pourrissent les livres, où la page tourne sans qu'on ait plus besoin de la tourner, où le temps attend l'oeil qui lira la fin, pour déclencher son sortilège séculaire.
Un vaisseau venu d'ailleurs, transportant une cargaison d'extraterrestres bien comme il faut, incompréhensibles et affreux. Une langue à décoder, à apprendre, pour communiquer. Une langue inconnue qui s'empare de la Terre, se répand comme un poison,  parasite les hommes... Un langage qui nous détraque et parle à travers nous. Qui nous parle.
Ou encore : quelques vers sur les cimes étourdissantes du monde, où chacun verrait jusqu'où il veut voir. Une vue imprenable, sur nos chimères et nos fantasmes.

Aujourd'hui, j'effleure seulement.