vendredi 30 avril 2010

Afternoons

Je déteste ces journées qui recommencent, toujours les mêmes, à chaque sonnerie de réveil. J'étouffe dans ces longs après-midi où l'horloge, entre 14h et 19h, me torture. J'aimerais que le temps passe vite, plus vite, ne pas sentir les gouttes glaciales des instants qui s'écoulent, une à une, sur mon esprit et mon corps. Tout, tout pour ne pas sentir ce monde vivre autour de moi, tout pour m'en échapper !

Perdre conscience, ne plus sentir. M'oublier moi-même, ne plus m'appartenir. Je veux pouvoir n'avoir, une heure au moins, plus existé. J'essaie de me désincarner, sans alcool ni drogues - des séries TV font tout aussi bien l'affaire. Pour affaiblir cette certitude qui braille en moi, que tout n'est que futilité. Ce n'est pas une vaine affirmation. Comment pouvez-vous ne pas sentir, parfois, jusqu'au supplice, à quel point tout ceci est horriblement douloureux, insupportable ? A quel point cette vie n'est qu'un jeu, une mise en scène inachevée ? A quel point le sens la fuit par tous les bords, et combien les mots que nous aimons lui attacher - bonheur, réussite, foi même - ne font pas le poids ?

Sans doute le pire est-ce qu'avec les années, j'ai fini par en être convaincue. Même dans les doux instants de calme où je me sens appartenir au reste, j'ai toujours au cœur une lucidité amère. Et oui, bien sûr, la vie en elle-même n'a pas de sens, c'est ce que nous faisons qui doit en avoir (m'a-t-on dit un jour). Pure rhétorique, c'est du pareil au même.
Les grands artistes sont ceux qui nous font sentir à quel point l'être est désespéré.

J'en rajoute ? Vraiment ? Ceux qui disent ça, ce sont ceux qui n'ont jamais pleuré au point de sentir quelque chose, en eux, se recroqueviller jusqu'à l'absence. Ceux qui pensent que le "coup de blues" passager et inexplicable a à voir avec le corps et les émotions, mais que les conceptions noires et fatales de l'existence humaine n'existent que portées par des mots, des raisonnements. Le verbe.

Mais toutes ces larmes n'ont pas de langage, et elles sont grandioses. Si proches de la vérité. Comme si l'âme entrait en résonance avec une essentielle fêlure du monde.

Ceci n'est pas un coup de déprime, ce n'est pas une baisse de moral. C'est davantage.

Parce que ça me donne envie de m'effacer.